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12 mars 2025

Dominique Fortier - dfortier@medialo.ca

Kim Métivier : survivre aux épreuves et en ressortir plus forte

Kim Métivier

©Photo Dominique Fortier - L'Avantage Gaspésien

Kim Métiver a réussi à se sortir du cycle de violence dans lequel elle vivait en allant chercher de l'aide.

L’histoire de Kim Métivier n’est pas joyeuse et son parcours de vie a été parsemé d’embûches. Toutefois, le message qu’elle envoie est rempli d’espoir pour toutes les femmes qui ont vécu des épreuves que personne ne devrait vivre.

D’entrée de jeu, Kim explique pourquoi elle souhaite parler de son vécu, même si celui-ci est loin d’être un conte de fées. « Je voulais en parler pour qu’on arrête de dire que les filles mentent ou exagèrent lorsqu’elles racontent leurs histoires. Je veux aussi que les gens comprennent que ce n’est pas facile de vivre après avoir vécu des événements traumatisants. Ça prend beaucoup de travail sur soi et énormément de courage pour passer à travers. C’est faux de penser qu’on peut simplement passer à autre chose. »

Toute jeune, Kim était une enfant très gênée qui ne disait pas un mot plus haut que l’autre. Elle se concentrait sur ce qu’elle avait à faire et réussissait très bien à l’école. C’est toutefois à son arrivée au secondaire que les choses ont pris un virage inattendu. « Sur l’heure du midi, on allait souvent se promener dans le bois aux abords du cégep après dîner. C’est à ce moment que j’ai fait la rencontre d’un petit groupe de garçons qui se sont mis à s’acharner sur moi et à m’isoler de mes amis. Ça s’est fait progressivement. Au début, ça passait comme un jeu où ils me pourchassaient et ça se terminait avec des attouchements. Mes amies ont d’abord tenté de s’interposer, mais elles se sont rapidement fait tasser de là. »

Kim est d’avis que les garçons ne réalisaient probablement pas l’ampleur de ce qu’ils faisaient et des répercussions de leurs actions à long terme. « À 12 ou 13 ans, c’est normal de faire des niaiseries, sauf que leurs niaiseries allaient avoir un impact sérieux sur ma vie. Et ce qui est sournois dans tout ça, c’est que ça devenait un automatisme. Chaque fois, je me disais que j’étais mieux de me laisser faire plutôt que de risquer de manger des coups. »

En plus de ressentir de la honte qui l’empêchait d’en parler à qui que ce soit, les situations étaient si répétitives que ça devenait, en quelque sorte, une nouvelle forme de normalité. « J’ai alors commencé à consommer de la drogue. Au début, c’était du pot mais c’est devenu des drogues plus dures par la suite. Je ne consommais pour vivre un high mais bien pour survivre à tout ça », ajoute Kim.

Comme sa dépendance était de plus en plus importante, elle a commis des petits larcins pour payer sa consommation jusqu’à ce qu’elle se fasse pincer par un commerçant. « Au lieu de me dénoncer à la police, il m’a dit que je pourrais le rembourser en acceptant de me faire prendre en photo dans des poses suggestives. À partir de ce moment-là, je sentais que mon corps ne m’appartenait plus et je n’avais plus aucune estime de moi. J’étais rendu si loin dans ma consommation qu’il m’est arrivé de m’auto-mutiler simplement pour confirmer que j’étais encore vivante. »

Par ailleurs, si elle ne se sentait pas capable de parler ce qu’elle avait vécu, son comportement avait complètement changé. Elle était devenue plus agressive et ses notes avaient dramatiquement chuté. Tout était prémédité car l’adolescente qu’elle était à l’époque se disait que si elle devenait « un cas problème », on la changerait de classe et d’école. À sa grande surprise, malgré ce changement d’attitude, sa capacité à cacher ce qui la troublait réellement était si efficace que personne de son entourage ne se doutait de ce qui se passait réellement dans sa tête et son cœur.

Le passage à l’âge adulte

Kim, son frère et sa mère sont déménagés en banlieue de Montréal où la même spirale autodestructrice s’est répétée. Adoptant encore des comportements agressifs qui étaient mis sur le dos de l’adolescence, Kim a fréquenté une école pour délinquants, mais jamais les véritables raisons derrière son attitude n’ont été dévoilées. « J’étais explosive car je voulais attirer l’attention pour que quelqu’un tente de découvrir ce que je vivais. Mais je passais sous tous les radars. J’avais beau lancer des bureaux dans la classe, je n’avais jamais de lourdes punitions. »

Puis à 16 ans, elle revenait s’installer à Matane, seule en appartement. Avec des parents dans des villes éloignées, elle devait compter sur elle-même pour « passer à travers la vie » tout en étant en perpétuel combat contre ses propres démons. « Et je me rends compte aujourd’hui que je me suis embarquée dans des relations amoureuses malsaines. Mais avec mon passé, me faire crier après ou me faire tabasser, pour moi ce n’était pas si grave. Je me relevais et je passais à autre chose. Je n’avais pu conscience que ce qu’on me faisait subir était tout sauf normal. »

Trouver un sens à sa vie

C’est à la naissance de sa fille que Kim a réalisé que jusqu’à maintenant, elle ne vivait que pour les autres et qu’elle ne se connaissait pas elle-même puisqu’elle s’était bâtie un personnage qui lui collait encore à la peau. « Je ne voulais pas que ma fille vive ce que j’avais vécu. C’est là que j’ai décidé de faire mon rôle de mère et de m’occuper de ma fille jusqu’à l’âge de trois ans, car je ne voulais pas que ce soit une gardienne qui fasse l’ouvrage à ma place. Par la suite, j’ai décidé de retourner à l’école, en faisant une thérapie en parallèle grâce au CALACS, afin d’avoir le courage de remettre les pieds dans une salle de classes. J’ai obtenu mon diplôme de secondaire 5 avec toutes les options possibles, même si à la base, je voulais simplement le strict nécessaire pour accéder à un DEP. J’ai finalement eu mon DEP en assistance technique en pharmacie et j'ai travaillé dans le domaine pendant 11 ans. »

Toute cette reprise à mains a valu à Kim de faire partie d’une publication scolaire soulignant un parcours exceptionnel. Elle a aussi été sélectionnée parmi les élèves de 150 écoles de la Commission scolaire pour obtenir une bourse de l’Association des directions générales scolaires du Québec.

Aujourd’hui, Kim a élevé deux enfants et se porte mieux. « Avant je me sentais comme une poupée qu’on pouvait jouer et qu’on jetait par la suite. J’ai encore cette image-là dans ma tête, mais maintenant, je sais que ce n’est qu’une image. Ça ne reflète pas qui je suis. »

Elle dénonce le fait que les femmes ne sont pas suffisamment crues lorsqu’elles racontent leur histoire. « Ce n’est pas facile de dénoncer car c’est toujours notre parole contre celle de l’agresseur et c’est très difficile de prouver ce qu’on avance hors de tout doute raisonnable. »

Toutefois, si la dénonciation est un parcours ardu, Kim insiste sur le fait qu’il est important de parler et d’aller chercher de l’aide. Elle a notamment suivi une thérapie pour femmes victimes d’agression sexuelle à la Maison La Grande Ourse où pendant deux semaines intensives, les victimes sont suivies par des intervenantes dans le but de se rebâtir une confiance et savoir où mettre ses limites. « C’est une ressource qui mérite d’être connue et qu’on devrait avoir dans la région. »

Kim insiste sur un dernier point fort important. « Comme le cycle de la violence est sournois et qu’on vient à banaliser certaines choses, il faut prendre le temps de s’arrêter se poser la question à savoir si ce qu’on vit est normal. Et il faut en parler et aller chercher de l’aide car ce qu’on vit a un impact sur nous, mais aussi sur nos enfants. Et il existe plusieurs ressources dont La Gigogne à Matane qui m’a aidé. Il est possible de se sortir de ce cercle vicieux et de devenir une meilleure personne, mais ça ne fait pas tout seul. »

Ressources

La Gigogne : 418 562-3377

CALACS : 1-418 725-4220

IVAC : 1-800 561-4822

Maison La Grande Ourse : 1-855 VIVANTE

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